29 Coups pour MPVite
Depuis 2007, MPVite (Manifestement Peint Vite), regroupement originaire de Nantes, a présenté 29 expositions d'œuvres inédites souvent réalisées sur place en réponse à leur environnement. Au CIRCA, après trois semaines de résidence de production, quatre artistes présentent des pièces qui s'inscrivent en écho avec l'architecture du lieu ou encore qui déplacent des formes issues du vocabulaire architectural dans un contexte d'exposition.
Le travail de Clément Laigle offre aux visiteurs une expérience visuelle qui se révèle peu à peu. Sur le grand mur du CIRCA, American Standard, un bas-relief blanc sur blanc, s'étend en deux formes géométriques d'une certaine complexité. Ce sont les plans de masse de coupes architecturales de châteaux médiévaux dessinés par l'architecte Eugène Emmanuel Viollet-le-Duc au XIXe siècle qui ont servi d'image source. Ce sont les déplacements du corps face à l'œuvre qui permettent de découvrir l'ensemble et de révéler les textures des motifs surdimensionnés. Devant la pièce murale, Mony (G.A.), un élément semblable à une poutre ou à une canalisation est suspendu à partir du plafond. Cette pièce, déplacée de son contexte, devient porteuse d'un sens nouveau, où ses fonctions potentielles sont laissées à l'imagination du regardeur.
John Cornu a réalisé une installation en correspondance avec l'espace qui l'environne, et plus spécifiquement les grandes fenêtres du CIRCA. La pièce Comme un gant est composée de huit monolithes noirs positionnés en cercle qui reprennent la forme de contreforts d'églises (sculpture documentaire). Comme chacun des contreforts est à l'envers et dépouillé de son rôle de soutien, on les reconnaît difficilement. Le positionnement des éléments mime celui de certaines prisons panoptiques (en étoile) où seuls les gardiens, positionnés au centre, peuvent voir ce qui se passe dans chacune des sections. Cette installation renvoie également au corps. Afin d'en apprécier la mécanique, le visiteur est invité à se déplacer entre les éléments.
Les rapports entre l'œuvre et le corps du visiteur intéressent également Luc Mattenberger qui travaille depuis plusieurs années sur les notions de force et de pouvoir. L'artiste utilise diverses stratégies afin de créer des moments de latence, d'attente et de peur suggérée. Les deux sculptures qu'il présente sont constituées de verre, matériau généralement utilisé pour la construction, et de tuyaux en métal qu'on retrouve dans les abris temporaires d'urgence. Toutefois, dans Sans titre (Stretched), il est difficile de ne pas projeter un usage lié à la torture des corps et, dans Sans titre (Restraint), on a l'impression que la pièce elle-même peut-être dangereuse, tout en étant fragile.
Enfin, Romain Boulay a réalisé Étais indigènes avec des madriers de peuplier jaune. Une essence rare et coûteuse en Europe. Il a fait couper les madriers dans le sens de la longueur, révélant les pigments des cernes de croissances de l'arbre, étonnamment proches de certains effets picturaux. Le positionnement de ces poutres dans l'espace est sciemment calculé de façon à permettre le déplacement à l'intérieur de l'installation. L'effet général est celui d'une jonction entre le sol et le plafond. Ce lien entre les deux espaces oscille entre l'impression de soutien, de tension ou de compression de l'architecture.
Geneviève Goyer-Ouimette |