Intitulée La fonction oblique, l’intervention de John Cornu pour le Hub – un blockhaus situé au centre ville de Nantes aujourd’hui reconverti en studio d’enregistrement – consiste en une greffe ou une série de greffes architecturales.
Sur l’une des faces du Bunker, l’artiste installe un nombre conséquent d’étais noires dites « étais tirant-poussant ». La hauteur et la croissance progressive des fixations sur l’édifice forme une pente ascendante ou descente et créée un jeu de perspectives. Cette oblique, si chère à Claude Parent et auquel le titre de l’œuvre fait d’ailleurs directement référence, génère un mouvement, une suite de diagonales, de segments inclinés qui viennent s’opposer aux verticales et aux horizontales de ce monolithe de fer et de béton.
Procédant d’un simulacre, l’intervention de John Cornu repose sur un paradoxe : elle infuse d’un côté une certaine fragilité à la forteresse, qui rappelons-le, fut pensée pour faire face aux pires armes de la seconde guerre mondiale, et dans le même temps – anticipant sur un éventuel scénario catastrophe –, offre un soutien à cette dernière, empêche toute dislocation ou affaissement, fait office de stabilisateur.
Bien qu’évoquant certaines œuvres de Bochner, Morris, Judd, Smithson ou encore Bladen, La fonction oblique se démarque pourtant du paradigme des années soixante et soixante-dix. Il y a en effet ici une volonté de métisser une esthétique minimale avec des éléments plus romantiques et une attitude presque narrative. En témoignent d’autres de ses dernières productions au sein desquelles l’aspect sériel et géométrique semble systématiquement troublé par des jeux de matériaux, de contextes et toute une stratégie indicielle qui invite le visiteur à une sorte de trajectoire sensible et mentale.
« Le bunker n’est pas réellement fondé ; il flotte sur un sol qui n’est plus un socle à son équilibre, mais une étendue mouvante et aléatoire qui s’apparente, en la prolongeant, à l’étendue marine »
Paul Virilio
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